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16-07-2012
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 xiangz.jpg DE NOTRE CORRESPONDANT A XIANGGANG


Jean Laîné-Duchatel nous écrit de Hong Kong où il passe quelques semaines. Xianggang est le nom de la ville en mandarin – ville qui est officiellement la « Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine ».


Aux termes de la « Déclaration conjointe du gouvernement de la République populaire de Chine et du gouvernement du Royaume Uni de la Grande-Bretagne et de l'Irlande du Nord sur la question de Hong Kong », selon le principe d'«un pays, deux systèmes » Hong Kong conserve son système capitaliste et sa façon de vivre pendant une période de cinquante ans à compter de 1997.


Les opposants de Hong Kong au système de Pékin doutent des scrupules des hommes au pouvoir là-bas (ou plutôt, là-haut puisque Pékin – Beijing – c’est littéralement la « capitale du nord ») à respecter cette déclaration. En tout cas, chaque année depuis 1998, le  1er juillet, à la date anniversaire du « transfert », ils organisent une manifestation de masse dans les rues de l’île. Celle de 2003 a été historique puisqu’elle devait provoquer la démission du gouverneur de l’ancienne colonie depuis 1997 – Tung Chee-hwa, un homme d’affaires surnommé à la fin en cantonais le « vieux gâteux Tung » – mais celle de cette année lui enlèvera peut-être sa place dans l’importance des changements politiques induits, fût-ce indirectement.
D’abord, parce que sur le plan des symboles, ce fut la manifestation du 15e anniversaire du transfert de souveraineté. Ensuite, surtout, parce que le numéro un du parti, de l’armée et du gouvernement de Pékin, le camarade Hu Jintao, était à Hong Kong pour cet anniversaire, appelé à Pékin celui de la « réunification » (et qu’une telle sortie est exceptionnelle) ; et qu’un nouveau gouverneur venait d’être élu, qui lui a prêté serment.


A visiteur exceptionnel, sécurité exceptionnelle : le quartier de son hôtel bouclé, un mur fermé de 2 m de haut alentour, rempli d’eau (cela absorbe le bruit, donc les cris des éventuels manifestants) ; un journaliste brièvement mais virilement saisi et arrêté pour l’infraction de « trouble à l’ordre public » du fait « d’avoir été trop bruyant », à savoir crié une question incongrue au président chinois… Mais surtout pompe exceptionnelle : Hu Jintao a passé en revue la garnison de l’Armée populaire de libération (APL) à Hong Kong, en veste dite « Mao » et selon un protocole militaire digne de la place Tiananmen, et le lendemain de la manifestation, il a assisté à des sauts de parachutistes de l’APL ; droit et immobile comme il sait se tenir devant les visiteurs étrangers dans la cité interdite, il était comme une bible vivante vers quoi le nouveau gouverneur – élu par un conseil législatif si peu représentatif – tendait le bras en prononçant son allégeance à la loi. Tout cela comme un contrepoint à la réalité  et sa dénégation : 400.000 personnes dans les rues le 1er juillet, manifestant contre le nouveau gouverneur Leung Chun-ying, supposé membre secrètement du parti communiste chinois (PCC).


Ce qui est piquant, c’est que ce communiste supposé n’était pas à l’origine le candidat de Pékin. Officiellement, Zhongnanhai – la cité interdite communiste – soutenait Henry Tang Ying-yen, qui depuis des années avait quitté ses affaires familiales de textile pour apprendre son futur métier de gouverneur au conseil législatif. Mais les deux concurrents devaient se livrer une guerre fratricide, sur fond de scandales, d’arrangements immobiliers et autres cachotteries révélées (rien de surprenant pour un politologue comparatiste…). Et surtout, il avait fallu le voyage aux Etats-Unis en février dernier du vice-président Xi Jinping – donné comme le successeur de Hu Jintao lors du prochain XVIIIe congrès du PCC en octobre – pour que des signes se manifestent et s’éclairent : on avait remarqué que Xi était flanqué durant toute sa visite d’un mystérieux homme d’influence de Hong Kong, et que c’est précisément à son retour à Pékin que l’onction communiste était passée de Henry Tang à C.Y. Leung. Qu’avait bien pu dire Xing à ses camarades pour leur faire changer d’avis ? Et aujourd’hui, lui-même retour de Pékin mais de Hong Kong, que peut penser Hu ? Même coupé physiquement des masses, l’empereur est informé : il sait le rejet par la population de Hong Kong du vassal qui lui a prêté hommage ; il ne doit pas avoir aimé ce voyage, vu les circonstances qui l’on entouré ; que pense-t-il de l’enquête menée tout dernièrement par Bloomberg sur les liens entre Xi Jinping – le leader-in-waiting – et sa famille, et tels milliardaires de Hong Kong… ?


Tromper l’empereur est un crime passible de la peine de mort. Que ce fût dans cette imprévisible Hong Kong – pas encore Xianggang pour tout le monde donc – qu’il fut commis, et que ses conséquences ébranlent peut-être les murailles de la cité interdite à Pékin, cela est une senteur délectable à plus d’un dans le « port aux parfums »…

Jean Laîné-Duchatel
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 confessions_de_seigneurs.jpg Jean Laîné-Duchatel est l'auteur de Confessions de seigneurs - Scènes de la vie de chasseurs de renseignements aux avant-postes , Editions du Palio, 2012

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