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Diagonales : La séparation des pouvoirs
19-03-2014
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"Vous m'avez demandé [...] si j'ai connu le rapport Fabre [procureur général de Paris, ndlr], je réponds non. Vous m'avez demandé si j'ai connu le contenu de ce document je réponds non. Vous m'avez demandé si j'ai donné un ordre quelconque à un magistrat, je réponds non! Jamais. Et je demande à M. Jaurès, président de la commission d'enquête sur l'affaire Rochette, de donner lecture de la déposition du président Bidault, qui est conforme à mes déclarations." L'homme qui s'exprime ainsi à la Chambre des députés le 17 mars 1914 est Ernest Monis, alors ministre de la Marine. – C'est exact, lui répond Jaurès, et j'ajoute que je ne comprends pas qu'on parle toujours d'un document qu'on ne voit jamais."

Rien ne se perd, tout se transforme.

 

Rochette est un Madoff de la Belle Epoque, qui a entretenu des relations avec certaines personnalités politiques, dont Joseph Caillaux. Condamné en 1910 à deux années de prison, il fait appel. Son procès en appel est prévu en mars 1911. Ernest Monis, tout juste nommé président du Conseil, craint que les audiences n'interfèrent avec les mesures que son ministre des Finances, Joseph Caillaux, doit défendre devant la Chambre dans les semaines qui suivent. Il demande à Victor Fabre, procureur général de Paris, d'intervenir auprès du président de la Cour d'appel afin que le procès ne débute que plus tard dans l'année. Fabre est embarrassé, mais s'exécute. Bidault, le président de la Cour d'appel, accepte, par sympathie pour lui, de différer le procès, qui n'aura lieu qu'en décembre 1911.  Fabre prend cependant soin de consigner ses états d'âme dans un document destiné à rester secret. Mais, en 1914, ce document est porté à la connaissance de Gaston Calmette, le directeur du Figaro, qui fait campagne contre Caillaux, à nouveau ministre des Finances. Le Figaro publie les lettres du ministre à sa future femme. On dit qu'il s'apprête à rendre public le document Fabre. Le 16 mars 1914, Henriette Caillaux, excédée, se rend dans le bureau de Calmette et l'assassine, entraînant la démission de son mari. Le lendemain, la Chambre débat du document Fabre (le rapport Fabre) que personne n'a vu et qu'Ernest Monis assure ne pas connaître. Plus tard au cours de la séance, le député Louis Barthou prend la parole et exhibe le document qu'il assure avoir recueilli des mains d'Aristide Briand, son prédécesseur au ministère de la Justice en 1913. S'agissant d'un document extra-judiciaire, Barthou soutient que celui-ci n'avait pas à être versé au dossier. Monis démissionnera le 19 mars : il ne sera plus jamais ministre et quittera la vie politique en 1920. Briand, Barthou, et Caillaux après quelques péripéties au cours de la guerre, poursuivront des carrières politiques éminentes.

 

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Jean-Jacques Salomon

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