Les manuels d'économie enseignent que l'argent est fongible. On ne peut exiger de son banquier qu'il restitue les mêmes billets que ceux qu'on lui a confiés. Un billet en vaut en autre : c'est ce qu'on appelle la fongibilité de la monnaie. Mais est-ce toujours d'actualité ? Voici en effet qu'on se met à distinguer l'argent bien gagné de celui qui l'est moins. La frontière qui les sépare est évidemment affaire de subjectivité. Mais la question dépasse celle des bonus et parachutes dorés. Certains paiements laissent un goût amer : celui qui, par pragmatisme, accepte de payer, se dit que c'est quand même, pour le bénéficiaire, de l'argent mal gagné.
Pourquoi ne pas imaginer la création d'une nouvelle banque dont on n'utiliserait les chèques que lorsqu'on paye à contre-coeur, voire avec mépris ? Leur encaissement aux guichets des agences promet d'être cocasse.
Jean-Jacques Salomon