Quelque Babylone américaine de l’avenir
04-07-2021
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Je vais ce soir à l’Eldorado, un café-concert du boulevard de Strasbourg, une salle à colonnes d’un grand luxe de décor et de peintures.
 
Mon Paris, le Paris où je suis né, le Paris des mœurs de 1830 à 1848 s’en va. Il s’en va par le matériel, il s’en va par le moral. La vie sociale y fait une grande évolution qui commence. Je vois des femmes, des enfants, des ménages, des familles dans ce café. L’intérieur va mourir. La vie menace de devenir publique. Le cercle pour le haut, le café pour le bas, voilà où aboutiront la société et le peuple… De là une impression de passer là-dedans, ainsi qu’un voyageur. Je suis étranger à ce qui vient, à ce qui est, comme à ces boulevards nouveaux sans tournant, sans aventures de perspective, implacables de ligne droite, qui ne sentent plus le monde de Balzac, qui font penser à quelque Babylone américaine de l’avenir. Il est bête de venir en un temps en construction, l’âme y a des malaises comme un corps qui essuierait des plâtres. 
 
Edmond et Jules de Goncourt, Journal, 18 novembre 1860








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Jean-Jacques Salomon

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