Ici, nous ne réparons rien
01-11-2020
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Il y avait à Léningrad un grand hôtel, l’Astoria, un palace comme tous les palaces, mais les gens qui l’habitaient ne ressemblaient guère au public habituel des palaces, comme ce camarade de Jean qui portait une blouse blanche et des bottes, et venait dans ma chambre de l’Astoria, pour nous parler des monts et merveilles que nous allions voir dans son pays, avec des mots qui semblaient inoffensifs et qui étaient grisants comme un vin nouveau. Ce fut ce camarade qui finalement nous expédia à Moscou, nous apporta les billets et nous accompagna à la gare, sans lui nous nous serions peut-être enlisés dans les nuits blanches de Léningrad… Sur le chemin de la gare, il disait, nous montrant le pavé défoncé, les murs écaillés : « Ici, nous ne réparons rien, ce n’est pas la peine, ici il y aura la guerre… » C’était en 1936. 
 
Elsa Triolet, Le premier accroc coûte deux cents francs, Denoël (Gallimard), 1944





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Jean-Jacques Salomon

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