Diagonales : La mauvaise joie |
27-01-2011 | ||
Se réjouir du malheur des autres est
une attitude qui semble assez fréquente. Les mots pour la désigner sont
pourtant rares et équivoques. Les Allemands disent occasionnellement Schadenfreude,
de Schaden (dommage, mal) et Freude (joie). Les Anglais utilisent
– rarement – le mot epicaricacy, du grec epicharicacia, de epi
(sur), kharis (plaisir, joie) et kakos (mauvais). Les Français
empruntent épicaricatie (ou épicaricacie) aux Anglais, de façon encore plus
exceptionnelle. D'autres expressions sont pratiquées : mauvaise joie, plaisir
sadique, etc. Mais on s'éloigne chaque fois du simple fait de se réjouir du
malheur d'autrui.
Les linguistes s'interrogeaient sur les raisons de cette pauvreté sémantique. Des psychologues du Dartmouth College (New Hampshire) viennent d'apporter une réponse. Par une série d'expériences, ils ont en effet démontré que l'on a tendance à fortement sous-estimer les malheurs des autres, surtout quand on est soi-même dans la souffrance. Si l'on manque de mots pour dire se réjouir du malheur des autres, c'est peut-être parce que, contrairement aux idées reçues, on ne le fait pas souvent.
Jean-Jacques Salomon
|
||