Compte tenu de la situation, les choix stratégiques doivent-ils être confiés aux ministres techniques ou à des responsables libérés des contraintes de la gestion administrative quotidienne ? Devant le Parlement, le représentant du Premier ministre a défendu  l'idée que la hauteur de vue d'un ministre en charge de la stratégie serait d'autant plus élevée qu'il se trouverait détaché de l'action au jour le jour. A un parlementaire qui mettait en doute la capacité d'un ministre sans administration à donner de réelles impulsions, il a été répondu que celui-ci compenserait par l'indépendance de son esprit la faiblesse de son intendance. A une autre objection quant à l'éventuelle rivalité entre un ministre technique et ministre sans véritable portefeuille, il a été précisé que l'un et l'autre seraient nécessairement appelés à collaborer, ainsi que la tactique se plie obligatoirement à la stratégie. Le représentant du Premier ministre a précisé que ce dernier souhaitait, dans la direction de la lutte, être entouré de personnalités suffisamment autonomes pour pouvoir l'éclairer et le critiquer.

Ce débat aurait pu avoir lieu à  l'Assemblée Nationale à l'occasion de la nomination du ministre de la relance. Il s'est tenu à Westminster le 8 avril 1943, quand le Parlement britannique s'interrogeait sur la composition du Cabinet de guerre.

Jean-Jacques Salomon

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